Pionnières, les Caisses d’Epargne l’ont été dans de multiples domaines. Celui du logement demeure un des exemples les plus significatif de leur capacité à répondre aux besoins sociétaux naissants, par la diversité, l’ampleur et l’aspect novateur des actions menées.

Rembobinons ! La révolution industrielle en provoquant un exode rural massif déverse au cœur des villes une population qui s’entasse, faute de logements suffisants, dans des taudis insalubres. Les grandes épidémies de choléra des années 1830 témoignent des dangers sanitaires que représente bientôt cet habitat insalubre, considéré par ailleurs comme un possible foyer insurrectionnel. On cherche à y remédier. Dans le domaine, le Second Empire est marqué par des expériences pilote (cité Napoléon, familistère de Guise, pavillons de Mulhouse). Il faut néanmoins attendre l’avènement de la IIIe République pour que la question du logement devienne un des sujets de la sphère sociale. C’est dans ce cadre et à cette époque que de premières réalisations portées par des philanthropes voient le jour. En 1886, à Lyon, Félix Mangini fonde, avec l’appui de la Caisse d’Epargne dont il est président, la Société anonyme des logements économiques et fait construire des immeubles collectifs dans les faubourgs de la ville. Première expérience du logement de masse en France, ces réalisations constituent un formidable bond en avant et la preuve de la possibilité et des bienfaits d’offrir à tous un habitat salubre. À Marseille en 1888, Eugène Rostand, président de la Caisse d’Epargne des Bouches du Rhône, est le premier à mettre en évidence la place que doit jouer l’épargne dans le financement du logement social et le rôle des Caisses d’Epargne dans ce mécanisme. Il fait bâtir, sur les fonds de la Caisse d’Epargne, des maisons à bon marché, dotées du confort moderne dans le quartier de la Capelette. Cet emploi se généralisera au cours de la première moitié du XXe siècle, période pendant laquelle un nombre croissant de Caisses d’épargne utilisent leur fortune personnelle à la construction et à l’acquisition d’habitations à bon marché, ou à l’achat d’obligation de la Société des habitations à bon marché.
En autorisant le financement de l’habitat social par les fonds du livret A, la loi Siegfried de 1889 prélude par ailleurs au mécanisme de placement actuel des fonds d’épargne réglementée. En 1912, la loi Bonnevay donne une nouvelle impulsion décisive et offre à l’habitat social son ancrage public. Le texte désigne par ailleurs les Caisses d’Epargne comme un des acteurs de la gouvernance de ses bailleurs, consacrant ainsi leur rôle. Les lois de 1999, portant réforme coopérative des Caisses d’Epargne, puis de 2008 ont rappelé cet engagement de longue date en faveur de l’intérêt général.Fort de cet héritage historique, les Caisses d’Epargne sont aujourd’hui un acteur majeur du logement social : premier banquier privé des organismes de logement social, impliquées dans la gouvernance d’un bailleur sur trois, elles sont également, notamment au travers d’Habitat en région, leur pôle d’immobilier social, un opérateur de premier plan, dont le parc se compose de plus de 240 000 logements gérés.

Au-delà d’un toit, des services associés
La Caisse d’Epargne de Marseille construit et administre, dès la fin du XIXe siècle, des « habitations salubres » à bon marché. Elle n’en reste pas là. Elle propose rapidement aux habitants des services associés. Elle dispense ainsi des prêts hypothécaires aux ouvriers désireux de bâtir leur logement et des crédits pour l’assainissement et l’embellissement de leur foyer ; pour améliorer la vie quotidienne des locataires, elle aménage des parties communes, notamment une bibliothèque pour offrir à tous l’accès à la culture; elle invente le système de « l’épargne des loyers », mesure de pédagogie financière, permettant d’éviter les impayés.